Du concept de la mise en valeur des contenus par la «conservation», sur le Web et en art…

Anonyme, Cabinet de curiosités (fin XVIIe siècle). Huile sur toile (tirée du site cité dans le billet)

Les théoriciens de la modernité ont souvent parler de l’importance du fragment en art. Dans les médias, on a vu émerger l’idée de fragment autour de 2007, par la snack culture ou le média minute. Avec Twitter et Facebook, de nouveaux fragments de textes, des photos et des vidéos viennent commenter un événement, une réflexion ou un simple état d’âme exprimé.Or, comment donner un sens à tout ces fragments (souvent rattachés à des contenus) qui circulent sur les médias sociaux?

Après avoir acquis à Barcelone une copie du Journal of Curators sur les défis actuels de la conservation, le parallèle entre l’acte de mise en valeur des contenus Web et celui l’archivage par thème, des textes, vidéos et œuvres artistiques s’effectuait aisément… Il faut dire que mon mémoire de maîtrise traitait des œuvres archivées par Georges Maciunas, fondateur avec Yoko Ono de Fluxus.

Conservation ou mise en valeur des contenus… Storify un cabinet d’idées sur un sujet.

Nous avons vu récemment l’apparition de nouvelles applications ou boites, serais-je tentée de dire, comme Storify.com pour verser ces contenus et les mettre en contexte – Storyful montre bien ce que les journalistes (citoyens ou pas) de ces agrégateurs de contenus. En ce sens, même un blogue est une archive qui met en lien des sujets traités brièvement avec en complément des articles ou des études. En anglais, on appelle cette activité, curating contents ou la conservation des contenus, une expression empruntée au domaine de la conservation et l’archivage en muséologie.

Le parallèle : les boites-en-valise pour répondre à la multiplication des œuvres et des fragments

Le geste de réunir des fragments en un tout plus significatif n’est pas nouveau. La collection en est un bon exemple, l’archive aussi. Maciunas avait la passion de créer de diagrammes mettant en lien des courants artistiques et de créer des livres dans lesquels étaient insérés de petits objets ou encore des valises, boites ou cabinets où il pouvait réunir une série d’œuvres de petits formats des artistes associés à Fluxus.

Maciunas ne fut pas le premier artiste à souhaiter dans un geste à la fois ironique et artistique préserver la mémoire des œuvres souvent faites de matériaux modestes et à son époque, en marge du marché de l’art. Duchamp avait eu l’idée de produire entre 1935 et 1940 des valises contenant des miniatures de son travail. Lorsqu’on mentionne les boîtes-en-valises, la comparaison historique qui s’impose est sans aucun doute le cabinet de curiosités, un type de collection d’objets populaire aux xvie et xxiie siècles. Or, parmi les concepts de boîtes de Fluxus, celui qui se rapproche le plus des cabinets de curiosité ou des boîtes-en-valises de Duchamp, est sans aucun doute le Flux Cabinet, réalisé en 1977, et qui est ni plus ni moins qu’un cabinet d’archivage conçu par Maciunas pour contenir des œuvres de tous les artistes associés à Fluxus. Dans le Fluxus Codex, Jon Hendrick remarque aussi que ce cabinet a aussi été inspiré de la boîte-en-valise de Duchamp, de laquelle il emprunte cette notion de musée ou de constat du travail d’une entité (artiste ou groupe d’artistes) et il ajoute qu’il a été réalisé aussi sous l’influence de l’Anthologie de La Monte Young, une œuvre que Maciunas avait aidé à esquisser et exécuter en 1963.

Extrait de Positions historiques de Fluxus, page 94-95

Comme je le constatais, la boite comme œuvre d’art et archive est devenue un classique dans la production de quelques générations d’artistes qui s’y sont adonnés avec force et passion et la boîte s’impose maintenant comme un genre dans la production artistique moderne et actuelle. Mais ce qui détermine la valeur de la boîte, c’est ce qu’on met dedans…

Vers une évolution du blogue ? Et de la muséologie ?

Tout cela est bien beau, mais je dois dire, que je souhaiterais que mon blogue me permette avec autant de facilité que le fait Storify de citer des tweets, des vidéos ou des photos puisés un peu partout à même les réseaux sociaux que je fréquente. De même, quand je visite des musées, je suis toujours surprise de voir la difficulté qu’il semble y avoir à utiliser la mobilité avec créativité. On distribue des iPhones aux visiteurs (comme au MCQ l’été dernier), mais on s’en sert pour simplement dispenser la même visite commentée qu’on aurait autrement mise sur cassette audio, négligeant ainsi d’exploiter les possibilités que cette technologie offre. On utilise des écrans tactiles pour diffuser quoi? Des textes, comme ceux qu’on lisait auparavant sur les murs… La révolution viendra-t-elle de l’usage que les artistes feront des nouvelles technologies? Je l’espère.

Nadia Seraiocco

Spécialiste relations publiques et médias sociaux | conférencière | blogueuse

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