L’affaire Wagner/Thibert : critiquer l’apparence d’une fille est-ce banal?

Je lis ici et là, sur Facebook, Twitter, les réflexions sur l’affaire Wagner/Thibert… L’humoriste Guillaume Wagner qui se dit cinglant a mis une mise en garde imagée à son récent spectacle : les matantes qui aiment Marie-Élaine Thibert devraient s’abstenir. Pourquoi? Parce que Guillaume considère la chanteuse si laide, que «la fourrer devrait être déductible d’impôt».  Vite l’artiste a crié à l’intimidation. Puis les protagonistes se sont expliqués. Coup de pub, coup de gueule tout a été remballé aussitôt et ce bout du spectacle sera retiré.

L’animal, 1977… Belmondo et Raquel Welsh. Encore l’idée de la belle et la bête. La bête a du charme, des rides, un nez de boxeur, des cheveux gris et pratique un métier viril. La belle est belle.

Doit-on parler d’intimidation? Certainement pas, car il faudrait qu’il y ait abus de pouvoir et menace envers la chanteuse. Mais critiquer le physique d’une personnalité publique féminine, est-ce banal? Ne devrait-on pas critiquer ce pourquoi on l’adule, soit sa voix et ses interprétations?

On critique bien les hommes…

L’argument que j’ai le plus lu en faveur de Wagner est qu’on ferait pareil pour un homme. Mouin, moyen comme réflexion. Mais oui, on me dira qu’on se moque souvent allègrement du physique des chanteurs. C’est bien vrai et la discussion serait close si les critères de succès pour les hommes et les femmes étaient les mêmes. Or, on me pardonnera de péter cette balloune, mais ce n’est pas le cas. C’est pourquoi les hommes peuvent pratiquer le métier de présentateurs télé avec les cheveux grisonnants, des rides bien marquées, un peu de ventre et que leurs collègues féminines doivent afficher des cheveux impeccables, un visage lisse, une silhouette parfaite et une apparence sans faille peu importe leur âge ou leur expérience. C’est pourquoi aussi, des femmes qui refusent de se plier à ces exigences ou encore qui ont le malheur de ne pas avoir vieilli discrètement perdent parfois leur emploi. Des gars de talent qui perdent leur job d’animateur parce qu’ils sont moins frais à 55 ans qu’au début de leur carrière, je ne crois pas en avoir vu.

Dans ce contexte, critiquer cruellement le physique d’une femme est plus chargé.

Être une personnalité publique c’est ça

En partie oui, car attention, être une personnalité publique, journaliste, animatrice ou chanteuse implique d’être toujours bien mise ou de se voir sévèrement critiquée le cas contraire. Les revues à potins et bien des paparazzi font leur choux gras des gens connus pris en flagrant délit de linge mou et de cheveux gras. Il y a des femmes qui  se disent, pas de maquillage, pas de flaflas pour moi, je suis là pour mes idées. On admire leur force de caractère, on les remercie de rappeler qu’aucune fille n’a besoin d’être d’attifée comme une star d’Hollywood pour pratiquer un métier et on pince un peu les lèvres quand elles essuient un commentaire moche, le plus souvent lié à leur orientation sexuelle ou leur manque de sexe. Enfin… Alors, quand une fille comme Marie-Élaine Thibert est mignonne, s’habille bien, a une présentation irréprochable on s’attend à ce qu’on critique son travail pas son apparence. Sinon, bien il faut vivre avec l’idée que tous nos petits défauts sont susceptibles de nous disqualifier.

Métrosexuel ou juste plus beau qu’un cheval

Je vous laisserai avec une citation d’un monsieur qui est très probablement le grand-père de la radio d’opinion, comme cette Radio X que critiquait Guillaume Wagner a son passage à TLMEP, André Arthur (avec qui j’ai travaillé et qui n’a jamais critiqué mon apparence au contraire de d’autres) qui disait sur les ondes, pour résumer ce paradoxe et je cite de mémoire, « quessé que vous voulez, un homme, pourvu que ça soit plus beau qu’un cheval, c’est bien assez pour faire sa vie… ». Et, là, il marquait un point, car des Jean-Paul Belmondo féminines, soit des femmes au physique atypique qui jouent les séductrices, il n’y en a pas beaucoup.

Pour réfléchir plus longtemps et se demander si c’est vraiment pareil pour un gars et un fille…

Antoine Robillard, L’apparence qui pèse, publié sur le site de la FPJQ – Dans cette entrevue avec Jean-François Amadieu, professeur de sociologie à la Sorbonne, auteur du livre Le Poids des apparences, on remarque que Amadieu parle de l’importance de l’apparence pour les hommes et les femmes qui débutent leur carrière, mais il ne cite que des hommes qui peuvent avec l’expérience mettre ce critère de côté.

Il y a eu une controverse au sujet des cheveux gris à la BBC, et Fiona Bruce a déclaré I dye my grey hair because age is an issus for women on TV.

Nadia Seraiocco

Spécialiste relations publiques et médias sociaux | conférencière | blogueuse

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