6 décembre 1989 – Massacre de polytechnique

Ce jour-là, j’étais à l’université, vous dire combien cet événement a résonné pour nous, étudiantes du même âge que les victimes de Marc Lépine, ce serait encore trop peu. Parce qu’au-delà de la peur, de l’impuissance, du sentiment d’injustice, il m’a fallu 15 années et autant d’expérience de vie pour comprendre un peu mieux cette histoire ou à tout le moins y voir un sens plus large.

En septembre, quand j’ai parlé aux filles de Creacamp des Guerrilla Girls, je voulais tout particulièrement démontrer que nous ne sommes pas issues d’une longue lignée de femmes qui ont eu toute liberté du choix de leur vie. Le droit de vote a été accordé aux femmes du Québec en 1941 et les premiers organismes féministes ont vu le jour dans les années 70, or si nous avons toujours connu un monde, disons, enfin, assez égalitaire, il a été autrement pour nos mères et nos grands-mères.

Le geste de Marc Lépine marquait tout au plus 15 ou 20 ans de prise de parole féministe au Québec, mais je n’en étais pas alors consciente. Et croyez-moi, il y encore des choses à dire, parce que l’histoire ça ne se refait pas en 30 ans.

Pour en savoir plus sur les activités et les réflexions en ce 6 décembre 2007, lisez l’article de Louise Leduc.

Nadia Seraiocco

Spécialiste relations publiques et médias sociaux | conférencière | blogueuse

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8 réflexions sur « 6 décembre 1989 – Massacre de polytechnique »

  1. Je n’étais pas à l’université ce jour-là mais je suis parti de chez moi dans le Mile End pour faire partie de la vigile, je crois le soir même, à une température irréellement sibérienne. Nous étions quelques centaines avec nos chandelles à monter la côte de Polytechnique pour signifier au minimum notre désapprobation totale de cela qui était innommable. Nous avons beau avoir nos différences que cela ne justifiera jamais quelque tuerie que ce soit. Ni ici, ni au Darfour, ni où que ce soit.
    Là-haut, il y avait Mulroney qui venait d’arriver d’Ottawa et qui se devait lui aussi d’être là. Aux noms de tous les Canadiens.
    Ce fut un moment de grande émotion pour tout le monde qui ne peut être oublié. On se demande toujours ce qu’on aurait pu faire de plus. Le reste de nos existences doit consister à ne pas prêter flanc à la violence.

  2. Merci de ce témoignage… Je pense que c’est ce genre de souvenirs qui nous convainc que le seul féminisme possible est un humanisme.

  3. Allô,
    En décembre 1989 j’étais en poste à Islamabad, la capitale du Pakistan, depuis avril 1987. De la violence, j’en avais vu en masse. Je savais que je revenais au Canada à l’été 1990.
    Polytechnique m’a profondément ébranlé : ça se passait chez nous aussi cette merde!

  4. J’avais six ans.

    Ma cousine est née ce fameux 6 décembre 1989 dans un hôpital montréalais. Mon oncle ne pouvait pas aller voir sa femme qui accouchait : une telle confusion régnait partout et les hommes, quels qu’ils soient, n’étaient pas admis dans les couloirs des hôpitaux.

    J’ai des souvenirs très confus de ce soir-là. Ma tête d’enfant en a sûrement mélangés quelques-uns. Je me rappelle ma mère « scotchée » au téléphone. Je me rappelle célébrer avec ma famille l’arrivée d’une magnifique petite fille qui allait s’appeler Virginie. Mais je me rappelle aussi, vaguement, un état d’alerte, des coups de téléphone répétés, la télévision allumée, mes parents secoués, bouleversés.

    Ma petite cousine aura 21 ans demain. Chaque année, le jour de son anniversaire, on lui parle de ces 14 jeunes femmes tuées le jour de sa naissance dans ce qui doit être la tragédie la plus horrible de notre histoire québécoise.

    J’ai toutefois souvent le « feeling » qu’elle incarne à elle seule la vie… et l’espoir.

  5. Michel : merci de partager ce souvenir…

    Aude : tu as tout à fait raison, la vie s’impose, même si cet événement nous a fait réfléchir…

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