Gestion de crise sur les réseaux sociaux : pensez-vous à votre CM?

Le cycle de la gestion de crise... Le retour à la normale est-il normal?
Le cycle de la gestion de crise… Le retour à la normale est-il normal?

Ce billet sur la gestion de crise sur les médias sociaux nourrit une réflexion plus large qui sera présentée lors d’une conférence de la Téluq, dans la série des Grands Communicateurs le 27 mars prochain. J’espère que vous y serez en personne ou en ligne…

Il y a toute une différence pour l’animateur de communauté qui interagit avec vos abonnés, entre gérer une crise communicationnelle (qui origine donc d’une déclaration maladroite ou une perception négative) et gérer une crise qui résulte d’un accident, voire d’un décès, donc qui a porté atteinte à la sécurité physique et émotive d’un groupe de personnes. Avec la 3G et les appareils mobiles partout, ces tristes évènements se retrouvent sur les réseaux en moins de temps qu’il faut pour se ressaisir et votre animateur doit calmer les témoins et renseigner les badauds… Délicate tâche. Mais après coup, vos gestionnaires pensent-ils à en discuter avec les responsables de vos médias sociaux?

Les réseaux sociaux sont le prolongement de vos opérations quotidiennes

Depuis 2011, je dispense une formation sur la gestion de crise sur les réseaux sociaux.  Quand je parle de gestion de crise, je ne me fie pas uniquement à des cas puisés ici et là parmi les « best of » des médias sociaux et des guides en la matière. J’ai été plongé dans la gestion de crise un certain mardi de septembre 2001 et ensuite, j’ai participé à trois cellules de crise avec Jean-Bernard Guindon de la Sécurité Civile de Montréal…  Rapatriement des Québécois en 2001, crise du logement et débordements de rivières, ce sont là des crises qui mettent en danger la sécurité des citoyens. Les crises communicationnelles, qu’on règle en quelques communiqués, trois entrevues et quelques interventions privées sur les réseaux sociaux, risquent de porter atteinte à la notoriété de l’entreprise, mais à court terme personne n’est en danger. Dans le cas des crises qui touchent la sécurité des citoyens, les gestionnaires de cellules de crise sont formés pour « debriefer » les employés et au besoin identifier ceux qui ont besoin de repos ou même de parler à un spécialiste. Quand les réseaux sociaux ne sont pas intégrés au plan de gestion de crise de l’entreprise, cette partie importante de la résolution de la crise est éludée.

Un cas bien précis : un suicide dans le domaine des transports

Dans un récent mandat, j’ai eu à gérer sur les réseaux plusieurs crises avec l’animatrice de soir attitrée. Un cas-type a particulièrement retenu mon attention, celui d’un décès dit « accidentel », mais qui avait toutes les apparences d’un suicide. L’affaire avec ce type d’évènement, c’est que les témoins sont sur place, souvent captifs dans un véhicule et voient souvent le travail des policiers et ambulanciers sur le site. Les commentaires sur les réseaux sociaux ne se font pas attendre. Le rôle de l’animateur de communauté devient alors un rôle de réassurance, de transmission de l’information et de diplomatie. Souvent, à bord dudit véhicule certains passagers sont très émotifs et décrivent tout ce qu’ils perçoivent sur les réseaux, voire publient même des photos… Le lendemain d’un pareil évènement, je faisais le rapport relatif aux médias sociaux à la haute direction, je transmettais les remerciements et félicitations à notre animatrice (nous étions souvent plutôt lessivées le lendemain) et la vie continuait. Je me suis demandé dans quelques cas, s’il n’eut pas été approprié pour notre gestionnaire de nous offrir une formation ou une discussion avec un psychologue pour savoir comment intervenir et rester en bonne santé.

Une intervention mal menée : pire que rien du tout

Dans mes quelques expériences de gestion de crises en entreprise, j’avais été habituée à ce qu’après un évènement difficile, même après une simple crise communicationnelle forte en émotions, mon patron ou ma patronne me propose de prendre un café pour voir si tout était dans l’ordre, si je souhaitais prendre une journée de congé ou juste en parler. La plupart du temps, cette seule attention était suffisante, mais il y a des cas ou après avoir travaillé 16 heures par jour pendant trois ou quatre jour, une grasse matinée (ou deux) s’impose. Je ne fus pas surprise lorsque le lendemain d’une crise redevable à un décès dont la gestion s’était entendue bien après minuit, que mon patron me demande dans un corridor comment cela a été. Le choix du moment était discutable, mais en marchant, je lui explique que la situation était délicate, que notre animatrice a bien réagi en m’appelant et que notre travail concerté a été efficace… À peine ai-je eu le temps de terminer ma phrase, qu’il se met à me parler de suicide et du courage que cela prend pour se mesurer à un véhicule de cette taille. Interloquée, je lui rappelle que mes pensées vont à nos collègues qui ont géré la situation sur place, au conducteur qui a eu un choc et aux passagers qui ont vécu ce triste évènement. Sans comprendre mon message, il a repris sur le courage du suicidaire et j’ai alors mis fin à la conversation. Très franchement, cette intervention maladroite, dans un contexte inapproprié et surtout sans l’ombre d’une quelconque reconnaissance pour le travail difficile accompli par nos équipes, m’a laissé un gout plus amer que les silences qui entouraient habituellement ces évènements.

La solution?

Appliquer à la gestion du personnel qui anime les réseaux sociaux les mêmes attentions et formations que celles prévues pour les équipes qui interviennent sur le site des accidents… Gérer la communication et rassurer des clients sur les réseaux demandent un grand tact et comporte aussi un risque. Le fait que cette interaction soit dans un univers virtuel, ne la rend pas moins réelle. Il faut donc s’assurer que les animateurs sont bien formés et encadrés. Pensez aux téléphonistes du 911, il ne nous viendrait pas à l’idée de minimiser leur apport dans une gestion de crise ou les effets que ce travail peut avoir sur leur santé. À mesure que toutes nos sphères d’activité trouvent leur prolongement dans les réseaux sociaux, il est grand temps d’intégrer tous nos gestes en prévention de crise et en suivi avec les employés qui gèrent ces crises.

Sources d’information dans cette présentation qui sera mise à jour en 2013

Nadia Seraiocco

Spécialiste relations publiques et médias sociaux | conférencière | blogueuse

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