Deux femmes américaines : Gabrielle Giffords et Sarah Palin

Gabrielle Giffords et son mari le capitaine de la marine et astronaute, Mark E. Kelly.

Quand on parle politique, je suis une modérée (à en énerver tout le monde), mais sur certains points je suis intraitable. Dans ce qui touche, la protection des enfants, l’accès aux services de santé (une affaire rare de nos jours) et une certaine liberté d’expression, je ne modère pas mes transports. Disons que je m’identifie plus à Gabrielle Giffords qu’à Sarah Palin, ce qui ma foi, en des temps où la modération n’est pas bien vue, semble une position dangereuse. Par ces deux femmes, on peut pourtant voir le portrait de deux Amériques opposées : l’une démocrate qui parle de justice sociale et veut limiter les abus financiers, l’autre républicaine qui revendique ses acquis historiques et ne veut en rien être contrôlée par l’État.

L’image d’une Amérique dont les différentes parties peuvent cohabiter. Gabrielle Giffords est une modérée, une vraie, ses positions montrent un engagement réel pour la justice sociale tout en tenant compte de la réalité de son coin de pays. Elle a été élevée dans un environnement religieux mixte et c’est par choix qu’elle s’est identifiée à la culture religieuse juive de son père, devenant la première représentante élue juive en Arizona. Tout en défendant clairement les positions des démocrates sur l’éducation et la santé, elle s’est parfois opposée à ses collègues politiques en gardant une position modérée sur le port d’arme, une réalité de sa région. Si vous avez suivi ses sorties récentes dans les médias, vous avez pu voir que Giffords est une habile communicatrice qui passe ses messages sans accuser avec force comme le font trop souvent les républicains. Tout en défendant la liberté d’expression, elle avait mis en garde Palin est ses accolytes (voir la vidéo ici) contre les dangers de la rhétorique guerrière qu’ils véhiculent avec des outils de propagande comme leur carte à cibles. Elle le fait sans agressivité ne donnant pas de prises à ses adversaires.

Sarah Palin, le Tea Party a payé 100 000 $ pour une de ses conférences... J'espère que les petites notes dans ses mains étaient intéressantes.

Soulever ces vrais Américains qui ne reconnaissent plus dans la diversité. Sarah Palin a toutes les caractéristiques de cette classe moyenne américaine blanche qui disparaît de plus en plus. Baptisée catholique à la naissance, elle a été rebaptisée pentecôtiste. Quand on sait l’importance sociale de la religion aux États-Unis, ce n’est pas anodin. Née en Idaho, elle arrive à un très jeune âge en Alaska. Le reste est une histoire que vous connaissez : elle rencontre son mari au secondaire, devient capitaine de son équipe de basket, puis est élue Miss Wassilia, complète des études en communications et sitôt cela accompli, un peu de journalisme télé, puis une carrière entrecoupée par cinq enfants (dont le petit dernier qu’elle a eu au début de la quarantaine) qui ont tous des prénoms plutôt modernes comme Willow, Piper et Track. Quant à ses positions politiques, disons qu’elle s’est fait connaître en parlant de sécurité publique et de transports. Chez elle  pas de nuances : elle s’est immergée dans le discours républicain et sa rhétorique belliqueuse. Même avec des positions préfabriquées, on sent souvent que les petites notes qu’elle écrit dans le creux de ses mains ne suffisent pas à enrichir son discours. Pourtant, malgré les inepties et les dérapages médiatiques de Palin, la machine promotionnelle continue de la promouvoir. C’est une bonne pâte, faut-il croire.

American at Heart… Puis, autour de ces deux figures féminines, il y a tout un bouillonnement social, dont les médias parlent peu. Une crise économique finit sur papier, mais loin d’être traversée pour les familles à la rue qui travaillent à temps plein, vivent dans des refuges en attendant de finir de payer l’hypothèque d’une maison qu’ils n’ont plus. Il y a aussi une guerre en cours qui ramène chaque semaine, sans tapage, les corps de ces jeunes soldats tombés à l’étranger, sans compter ceux qui reviennent blessés. Cet étranger, hostile, à cause de qui l’Amérique vit une crise… Ou enfin, c’est ce que certains aimeraient croire. Et l’étranger, il est partout surtout dans ceux qui ne sont pas clairement identifiés et peinturés tout en rouge ou tout en bleu…

Nadia Seraiocco

Spécialiste relations publiques et médias sociaux | conférencière | blogueuse

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7 réflexions sur « Deux femmes américaines : Gabrielle Giffords et Sarah Palin »

  1. Ping : Nadia Seraiocco
  2. Ping : LisaMarie Noël
  3. Bonne analyse, Nadia. Et quelle photo. Je l’ai déjà recyclée.

  4. Quand on ne veut plus voir la réalité en face, mais que les citoyens la vivent, l’inadéquation de toutes ces parties finit vite par créer un grave déséquilibre…

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